Michel GUÉRIN

Né en 1946, le philosophe Michel GUÉRIN, membre de l’Institut universitaire de France, est l’auteur d’une quarantaine d’ouvrages : essais, romans, théâtre.

Après une période passée en Allemagne, Autriche et Grèce en qualité de conseiller culturel de l’ambassade de France, Michel Guérin a enseigné l’esthétique à l’Université d’Aix-Marseille dont il est professeur émérite.

Auteur entre autres de Nihilisme et modernité (2003) et d’Origine de la peinture – Rembrandt, Cézanne et l’immémorial, il publie aux Éditions Actes Sud (octobre 2018) Le Temps de l’art – Anthropologie de la création des modernes.

Dans un livre qui paraît ce mois-ci chez Actes Sud, intitulé Le Temps de l’art – anthropologie de la création des modernes, Michel Guérin analyse, du Quattrocento à l’ère postmoderne, une réactivité de la création artistique au temps de plus en plus marquée, le temps finissant parfois (ainsi chez Proust) par devenir le thème essentiel.

Qu’est-ce qu’une époque, sinon un arrêt sur image, une coupe de temps, comme si celui-ci était devenu l’otage d’images qui le « datent » et paraissent un moment le suspendre. La venue au premier plan du temps signifierait-elle que son ouvrage fut de vider étape par étape l’art de sa substance ?

Ces analyses font apparaître parallèlement une mutation de l’Idée de création. Au temps de la Renaissance, l’humanisme s’empare de l’idée de Poïesis – « ce qui fait, dit Platon, passer de la non-existence à l’existence » – jusqu’à considérer, avec Alberti (vers 1430) que les peintres « sont presque pareils à des dieux ». De fait, l’art classique, pour s’être émancipé du surnaturel, reste empreint de spiritualité. Mais la montée en puissance du monde profane, du rationalisme scientifique et technique n’a de cesse, selon le mot de Malraux, de « dédiviniser » l’art moderne. Si Picasso a encore conscience d’être un démiurge, lui qui ne croit à aucun dieu, que dire des stars de l’art mondialisé (type Jeff Koons) pour qui l’art a perdu toute signification métaphysique ?

La conférence s’emploiera à thématiser quelques phases particulièrement significatives de cette évolution-déconstruction. La question cruciale qui s’impose à la fin : qu’est-ce qu’un art entièrement coupé du spirituel ?

Mohamed Rachdi, Fragments de la Bibliothèque de Majnoun, 2018

Mohamed Rachdi, Fragments de la Bibliothèque de Majnoun, 2018